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Contributions
 
S’affranchir de la frontière

Claire Médard
S’affranchir de la frontière ? Pratiques et représentations de la frontière au Kenya à la veille de l’indépendance : de la domination à la contestation
Résumé de l’intervention du 6 mars 2009

L’exemple développé porte sur le tracé de frontières régionales au Kenya à
l’indépendance et sur les revendications autochtones auquel celui-ci a donné
lieu. Ces revendications sont l’expression d’un rapport au territoire
introduit, durant la colonisation, par une administration centralisée au
fondement territorial. Elles contribuent à souligner le succès, par rapport
aux marges et aux fronts, où la présence se négocie, de frontières
linéaires, instituant des domaines ethniques séparés, exclusifs.

La variété de frontières souligne différentes conceptions territoriales.
Lorsque la frontière est à la fois rituelle et politique ou que le front se
trouve à la fois en marge et au cœur d’un renouvellement social et
politique, il devient difficile d’isoler conceptuellement une dimension
exclusivement politique du territoire. C’est pourtant ce que le territoire
de l’Etat nous invite à faire. L’Etat se représente par son territoire,
niveau strict d’une appartenance à une entité politique déconnecté d’autres
réalités. Il s’agit d’une représentation mais aussi d’un rapport concret à
l’Etat : la frontière, le poste administratif, le permis de se déplacer, de
cultiver, etc. Durant la colonisation, l’Etat met en œuvre des techniques de
contrôle pour permettre l’exercice de son pouvoir sans rechercher une
adhésion politique. Dans le cas du Kenya, le territoire de contrôle, qui
tire son origine de la colonisation et d’un contexte de colonisation de
peuplement, se caractérise par le recours systématique à des frontières
intérieures (réserves ethniques, naturelles, etc.). Des frontières, ou tout
au moins une logique territoriale, qui ont été amenées à avoir un impact
durable, au-delà de la période coloniale. La « logique territoriale » à
laquelle il est fait référence ici se définit par une action politique qui
se fonde sur la séparation, la distance introduite par la frontière et en
fin de compte la division et l’exclusion. Au Kenya, la pratique
administrative de contrôle, qui s’exerce par rapport à une région d’origine,
perdure, sans rapport aux nouvelles orientations politiques prônant
l’ouverture des frontières intérieures et la libre circulation affirmées à
l’indépendance.

A partir d’exemples tirés de mémorandums adressés à la Regional Boundary
Commission à l’indépendance, il apparaît que la contestation de la logique
territoriale et du principe de frontière est rare. En revanche, les
affirmations territoriales sur le mode exclusif, autrement dit les
revendications autochtones, abondent et bon nombre de frontières
intérieures, introduites sous la colonisation, sont recyclées dans ce
contexte.

 

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